L’une en tailleur-pantalon orange, l’autre parée de son violet de campagne. La puissante présentatrice américaine Oprah Winfrey a reçu jeudi soir la candidate démocrate Kamala Harris, non pas dans son talk-show mais lors d’un événement inédit, composé spécialement pour la rivale de Donald Trump par la papesse de la télévision américaine. « Unite for America » était organisé avec le groupe d’activistes Win with Black Women, dont l’objectif est de pousser les indécis et les abstentionnistes à aller voter, et à soutenir Harris dans des Etats-clef comme la Pennsylvanie, la Géorgie et le Michigan, où a été tournée l’émission.
Oprah Winfrey, que beaucoup aux États-Unis n’appellent que par son prénom, avait pour l’occasion appelé une brochette de vedettes, qui sont intervenues par écran interposé, en téléconférence : la chanteuse Jennifer Lopez, les actrices Meryl Streep, Julia Roberts ou Tracee Ellis Ross, la fille de la chanteuse Diana Ross, les acteurs Bryan Cranston et Ben Stiller, ou l’humoriste Chris Rock. « Je veux amener mes filles à la Maison Blanche pour rencontrer cette présidente noire », s’est enthousiasmé ce dernier.
Environ 400 personnes avaient été réunies dans le studio pour échanger avec Kamala Harris, et des dizaines de millions de spectateurs ont suivi ce grandiose talk-show de campagne sur les comptes YouTube, Instagram, Facebook, TikTok ou Twitch de l’une ou l’autre des deux femmes.
« Kamala Harris a libéré une force unificatrice comme nous n’en avons jamais vu en politique depuis très longtemps. Et je sais que beaucoup de gens le ressentent parce que c’est vraiment de l’espoir et de la joie qui montent. Pouvez-vous le sentir ? Vous pouvez le sentir », a commencé Winfrey, affichant encore plus clairement qu’à la convention démocrate son soutien à Harris. Elle lui a ensuite posé une série de questions très favorables, sur des thèmes comme l’immigration, le coût de la vie ou l’avortement avant d’écouter des récits de certains participants, souvent en larmes.
« Vous regardez une mère brisée, la pire douleur qu’une mère, qu’un parent, puisse ressentir », lui a dit Shanette Williams, la mère d’une jeune femme de 28 ans décédée en août 2022 en Géorgie après un retard de traitement à l’hôpital lié aux lois restrictives de l’État sur l’avortement. « Amber n’était pas une statistique. (…) Vous devez m’entendre. Les femmes du monde entier, les gens du monde entier, doivent savoir que cela était évitable », a-t-elle insisté tandis que certains, dans le public, pleuraient avec elle. « Je suis tellement triste. Et le courage dont vous avez tous fait preuve est extraordinaire », lui a répondu la candidate démocrate, ajoutant à l’adresse de l’audience que « cette histoire n’est malheureusement pas la seule, depuis que ces interdictions ont été mises en place. »
Dans son programme, la candidate démocrate a promis de rétablir le droit national à l’avortement, mis à mal par une décision de la Cour suprême de juin 2022.
« Je n’aurais probablement pas dû dire cela »
Dans un moment émouvant, la candidate a serré dans ses bras une lycéenne de 15 ans, Natalie Griffith, qui se trouvait au premier rang avec ses parents. La jeune fille a été gravement blessée par deux balles quand un élève de 14 ans a ouvert le feu dans son établissement près d’Atlanta, le 4 septembre dernier, y faisant quatre morts. Alors qu’Oprah lui disait avoir été surprise d’avoir appris pendant le débat avec Trump qu’Harris possédait une arme à feu chez elle, la vice-présidente a confirmé, maladroitement. « Si quelqu’un force l’entrée de mon domicile, il se fera tirer dessus », a-t-elle lancé, avant de se reprendre en riant : « Je n’aurais probablement pas dû dire cela. Mon équipe s’en occupera plus tard. » Et d’ajouter que « nous devons simplement faire preuve de bon sens. Depuis trop longtemps, sur la question de la violence armée, certaines personnes ont fait pression sur un choix vraiment faux en suggérant que vous êtes soit en faveur du deuxième amendement, soit que vous voulez confisquer les armes à tout le monde ».
Intervenant en zoom, Meryl Streep a confié s’inquiéter du danger si Donald Trump refusait à nouveau de reconnaître son éventuelle défaite dans les urnes, comme il y a quatre ans. « Je me demande si nous sommes prêts pour le 7 janvier », a dit l’actrice, en référence à l’assaut du Capitole le 6 janvier 2021 par les partisans du milliardaire républicain afin d’empêcher la certification de l’élection de Joe Biden par le Congrès.
Au même moment, Donald Trump se trouvait à Washington, où il s’est adressé à une organisation pro-Israël lors d’un rassemblement de lutte contre l’antisémitisme. Accusant Kamala Harris de ne pas avoir pris la défense d’Israël après l’attaque meurtrière du Hamas contre des civils, faisant 1 205 morts et de nombreux otages, le républicain a assuré qu’il était de l’intérêt d’Israël qu’elle soit battue à la présidentielle. « Toute personne juive qui voterait pour elle doit se faire examiner la tête », a ajouté le républicain.
