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Débranchée dans la nuit de samedi à dimanche, la plateforme de courtes vidéos va pouvoir bénéficier d’un sursis à partir de lundi. Après son investiture, le nouveau président des Etats-Unis pourra suspendre la loi interdisant le réseau social chinois sur son territoire.
«Franchement, nous n’avons pas le choix, nous devons sauver» TikTok. Le président élu Donald Trump, lors d’un dernier meeting, a confirmé dimanche 19 janvier au soir son intention de prendre un décret une fois investi, lundi, pour suspendre la loi interdisant TikTok aux Etats-Unis. Il a également proposé que le réseau social soit contrôlé à 50 % par des actionnaires américains. La loi votée au Congrès en 2024 est entrée en vigueur dimanche, rendant inaccessible la plateforme de courtes vidéos aux plus de 170 millions d’utilisateurs aux Etats-Unis.
Le texte prévoit la possibilité pour le chef de l’Etat de repousser la mise en œuvre de 90 jours le temps de trouver un acheteur, alternative offerte à la maison mère de TikTok, la Chinoise ByteDance, en lieu et place de l’interdiction. ByteDance s’est jusqu’ici refusé à céder cette plateforme lancée il y a à peine dix ans et qui est devenue incontournable pour une large majorité de jeunes internautes.
Dans la foulée, le réseau social a annoncé qu’il travaillait à rétablir l’accès à son application aux Etats-Unis, quelques heures seulement après l’avoir suspendu pour se conformer à une loi votée au Congrès. Dans un message posté sur X (ex-Twitter), le groupe a remercié le président élu Donald Trump pour avoir assuré aux fournisseurs d’accès à internet et boutiques d’applications qu’ils échapperaient aux lourdes pénalités prévues par la loi.
«Nous espérons que la partie américaine saura écouter la voix de la raison et offrir un environnement commercial ouvert, équitable, juste et non discriminatoire aux entités commerciales de tous les pays opérant aux Etats-Unis», a pour sa part réagi Pékin, via une porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Mao Ning, qui a souligné : «TikTok est une application très appréciée des utilisateurs américains et présente depuis de nombreuses années aux Etats-Unis. Elle a joué un rôle positif dans la promotion de l’emploi et la stimulation de la consommation aux Etats-Unis.»
«Ne pas laisser TikTok dans le noir !»
Donald Trump avait en effet encouragé fournisseurs d’internet et boutiques d’application à rétablir immédiatement l’accès à TikTok, promettant que son décret les protégerait rétroactivement contre d’éventuelles sanctions. La loi prévoit, en effet, de très lourdes amendes pour ces prestataires techniques, jusqu’à 5 000 dollars par utilisateurs pour les boutiques d’application. «Je demande aux entreprises de ne pas laisser TikTok dans le noir !», avait exhorté le promoteur immobilier sur son réseau Truth Social.
Donald Trump a aussi dévoilé les contours de ce qui lui apparaît comme une solution à la question sensible du contrôle de la filiale de TikTok aux Etats-Unis par des intérêts chinois. «Je voudrais voir une société commune contrôlée à 50 % par des Américains», a écrit le président élu. «Sans accord américain, il n’y a pas de TikTok. Avec notre validation, cela vaut plusieurs centaines de milliards, voire milliers de milliards.»
En l’état, TikTok a disparu des boutiques d’applications et les internautes qui l’avaient déjà téléchargé ne peuvent plus l’ouvrir. Depuis vendredi, le groupe avait demandé au gouvernement Biden d’envoyer un signal clair aux fournisseurs d’internet et gestionnaires de boutiques d’applications pour les dissuader de suspendre téléchargements et mises à jour. Mais la porte-parole de la Maison Blanche, Karine Jean-Pierre, a qualifié ces appels de TikTok de «manœuvre». «Nous ne voyons pas de raison pour TikTok ou d’autres sociétés d’agir avant la prise de fonction du gouvernement Trump, lundi».
Plusieurs acheteurs potentiels
Saisie par TikTok en dernier recours, la Cour suprême américaine avait refusé vendredi, à l’unanimité, de suspendre la loi. Les neuf hauts magistrats ont estimé que les inquiétudes du Congrès «en matière de sécurité nationale» étaient «bien fondées». Les élus américains avaient justifié le vote de la loi par la nécessité d’empêcher les autorités chinoises d’accéder aux données d’utilisateurs américains ou de manipuler l’opinion aux Etats-Unis.
Mais si la plateforme faisait l’objet d’une franche hostilité de la part de beaucoup d’élus américains il y a un an, le vent a tourné depuis et un consensus politique s’est dégagé ces derniers jours, favorable à la préservation de TikTok. Le report de l’entrée en vigueur de la loi n’est théoriquement possible que si des éléments tangibles rendent une vente crédible. L’homme d’affaires Frank McCourt s’est dit prêt à mettre 20 milliards de dollars sur la table avec d’autres partenaires, pour les activités américaines de l’application, sans son puissant algorithme. Samedi, la start-up d’intelligence artificielle (IA) Perplexity AI a soumis à ByteDance une proposition de fusion avec la filiale américaine de TikTok, qui valoriserait le réseau social au moins 50 milliards de dollars.
Migrations en masse vers l’application Xiaohongshu, «petit livre rouge»
Outre TikTok, ont été mises hors ligne toutes les applications de ByteDance aux Etats-Unis, notamment un autre réseau social, Lemon8, sur lequel avaient migré des TikTokeurs aux abois. Beaucoup de TikTokeurs se lamentaient dimanche de la mise en sommeil de leur app favorite, très prisée pour l’efficacité de son algorithme à proposer des contenus pertinents.
Zach King, l’un des dix TikTokeurs les plus suivis au monde (82 millions d’abonnés), a publié sur YouTube une vidéo humoristique le montrant quittant TikTok pour la plateforme chinoise Xiaohongshu (petit livre rouge), actuellement la plus téléchargée sur la boutique d’applications d’Apple. Edison Chen, fondatrice de Clapper, concurrent de TikTok, a fait état à l’AFP de plus de deux millions de téléchargements de l’application ces derniers jours. Parmi les applications les plus téléchargées dimanche aux Etats-Unis figuraient plusieurs sociétés de VPN, logiciels qui permettent de tromper sites et boutiques d’applications sur la localisation géographique de l’utilisateur.